La révision platonicienne de Philia

 


L’Occident a vu le passage entre la conception païenne (essentiellement grecque) de l’amitié — une amitié enveloppant tous les aspects de l’existence, jusqu’à une vision esthétique du monde et du soi — et l’éthique chrétienne du pur amour ; ce passage fut largement anticipé, sinon déjà assumé, par Platon. Les anciens grecs faisaient de l’amitié le lien affectif par excellence ; il incluait dans ses formes diverses l’attachement amoureux ou passionnel (philia érotiké), la bienveillance envers les hommes en général (philantrôpia), et bien sûr l’amitié proprement dite (philia hétairiké). L’amitié correspond à une relation positive de jouissance, de partage des plaisirs, en somme un « rapport » pleinement « réussi » excluant tout manque constitutif. Ce lien s’établit entre individus de même nature et de même rang, dans une sorte d’horizontalité ou d’immanence « simple », non relancée par quelque transcendance susceptible de creuser le désir et de causer l’insatisfaction. L’amour chrétien au contraire, s’il n’exclut pas une forme de satisfaction, se distingue d’abord par la distance infinie et l’impossible présence de son objet, surtout lorsqu’il s’appelle Dieu ou l’Absolu. Cette relation désormais verticale, fondée sur le désir et le manque, le sens du péché et le refoulement du plaisir, devient incompatible avec l’amitié païenne ; aussi finit-elle par induire un autre concept de l’amitié, plus en phase avec la vie de l’esprit qu’avec les simples affections, fussent-elles éduquées. Les chrétiens se mettent à aimer un Dieu qui leur refuse toute amitié ou la diffère infiniment ; aussi vont-ils former des confréries soudées (en quelque sorte amicalement) par cette même absence d’amitié. L’amour en général (pas seulement mystique) suppose un manque et présente l’aspect d’un grand dénuement, là où l’amitié en général jouit d’une présence et possède son objet. La question qui se pose maintenant, et que pose pour la première fois Platon, est de savoir qui possède la vraie richesse par-delà les schèmes sociaux d’appartenance, et qui d’un point de vue davantage moral que juridique est le véritable ami. 

On choisit sa famille, rarement ses amis...

 


Nous nous sommes permis, malicieusement, d’inverser la formule bien connue “on choisit ses amis, on ne choisit pas sa famille”, pour de solides raisons, croyons-nous, développées ci-dessous. Pour l’anecdote, l’origine de ce quasi-proverbe remonte notamment à Napoléon III qui, en bisbille notoire avec le tsar Nicolas Ier de Russie, lui aurait fait porter une missive contenant ces mots “l’on subit ses frères, et l’on choisit ses amis”, reprenant d’ailleurs ironiquement une formule de l’abbé Delille, poète à ses heures, écrivant : “Le sort fait les parents, le choix fait les amis.”

Introduisons notre propos par une interrogation en quelque sorte latérale : est-il légitime ou illusoire de penser que l’on peut se reconstituer une famille avec des amis ? Il y a bien indéniablement comme un air de famille, si l’on ose dire, entre la famille et les amis. Au-delà de ce qui légitime l’appartenance familiale, de fait ou de droit (le propre de la famille c’est justement que le droit et le fait se confondent, c’est ce qui la distingue de la société civile), en quoi consiste la valeur du lien familial ? Il n’est pas si instinctif ni si affectif qu’on le prétend : parlons plutôt d’un lien de solidarité par essence. Entre membres d’une même famille, on se soutient, surtout dans l’adversité, voilà l’affaire. C’est un lien organique où le groupe (son honneur, sa cohésion, etc.) prime sur l’individu, originellement, et en même temps un lien pragmatique, parce qu’on a toujours besoin d’une famille. De la même façon, on est censé pouvoir compter sur ses amis. Mais ce rapport d’assistance sera moins systématique, et ce n’est pas ce qui constitue l’essence du lien amical, beaucoup plus érotique en tant que tel selon nous.

L’amitié entre liberté et nécessité selon Spinoza

 


Pour Spinoza, seuls les hommes véritablement libres sont liés entre eux par une amitié sincère et solide. La liberté s'oppose en tout à l'ignorance, c'est-à-dire au point de vue tyrannique des affects ; au contraire elle ne résulte que de l'exercice de la raison, dans la droiture du jugement désintéressé. Il s'agit de suivre et de faire ce qui paraît le plus élevé, le plus nécessaire, pour soi-même comme pour autrui (car sur le plan du nécessaire, ce qui vaut pour l'un vaut également pour l'autre), et non d'échanger avec autrui de supposés bienfaits selon les critères extérieurs d'une fausse reconnaissance, qui n'est que trafic et séduction. Celui qu'on nomme ingrat, ne sachant rendre l'équivalent de ce qu'il a reçu, n'est bien souvent que l'homme sage et courageux préférant se tenir en retrait plutôt que de participer à un échange gros de conflits à venir. Il faut savoir prendre cette liberté de ne choisir pour amis que des hommes libres, guidés par la seule raison, et d'éviter autant que possible les ignorants. Évidemment, ces derniers étant plutôt la règle et les premiers l'exception, ce principe risque de contredire cet autre thèse spinoziste selon laquelle la liberté s'épanouit en société. C'est pourquoi « autant que possible », le retrait nécessaire ne doit pas conduire à une solitude qui reviendrait à être haï et donc rejeté par la société. Le principe spinoziste de l'amitié, s'il revient quand même à un certain élitisme de la raison, ne consiste pas en une attitude superbement individualiste détachée de toute dimension politique. En réalité, comme la notion de reconnaissance (opposée à celle de bienfaisance) qui la définit jette un pont entre les plans affectif et rationnel, l'amitié occupe l'espace subjectif entre une servitude et une liberté également pures.

Le tabou de la tendresse

 


Dans Les origines de l'amour et de la haine (1935), le psychiatre Suttie relevait un véritable et indubitable « tabou de la tendresse ». Chacun peut voir en effet qu'on n'accepte les manifestations de la tendresse qu'entre parents et enfants ou bien entre amoureux. En tout autre occasion, le geste tendre paraît plus inconcevable et déplacé que bien des manifestations grivoises ou obscènes. Pourquoi prendre la main, effleurer la joue de l'autre sont-ils des actes si difficiles et quasiment impossibles à assumer spontanément ? Mis à part certains contacts autorisés et coutumiers (comme la poignée de mains ou la tape « amicale », sans oublier l’inévitable « bise » - double, triple, quadruple…), et malgré l’essor d’un nouveau souci de soi corporel - inséparable du souci de l'autre, en tant que "vulnérable" -, l’on ne se touche guère dans nos sociétés occidentales. Faut-il s’en plaindre, au regard des risques indéniables de sexualisation, voire de brutalisation inhérents aux échanges corporels entre animaux-humains ? Ne faut-il pas, sinon condamner, du moins limiter les effusions tendres au nom de la "pudeur" ? On le voit, le sujet est délicat... Dans ce contexte, oser la tendresse physique s’avère être une gageure non seulement entre personnes étrangères mais également entre amis. Généralement, les douceurs du regard et les accents tendres de la parole suffisent ; il n'empêche que, même sous ces formes relevées et déjà spiritualisées, la tendresse paraît difficilement soutenable au long cours. Elle est davantage l'exception que la règle.

La belle âme et l'amitié. (D'un idéalisme congénital dans les conceptions philosophiques de l'amitié)

 

Louis Janmot, Le poème de l'âme - l'idéal, 1854

Aristote, déjà, se conformait à une vieille tradition en définissant l’ami comme une âme unique siégeant en deux corps. Pareil « nouage » assure aux deux âmes une parfaite connaissance mutuelle, leur promettant toujours plus de pureté et de spiritualité. Cependant, l’unité idéale des âmes ne laisse-t-elle pas cruellement impensée la dualité réelle des corps ? On constate qu'une ségrégation s'opère directement à partir des corps au nom de la différence sexuelle. Pour la tradition, une amitié véritable ne saurait exister entre deux femmes ou entre un homme et une femme, mais seulement entre deux hommes. En d'autres termes, l'âme n'est rien moins que sexuée, malgré ce qu'on en dit : bien qu’elle s’accorde au féminin, elle recouvre (spécialement dans l'amitié) une réalité masculine, marquée d’un évident narcissisme. Lacan disait, à propos de cette identification des âmes : « l'âme âme l'âme » (Encore, p. 78). Aimer d'amitié, au sens où l'on veut du bien à l'ami, c'est toujours réduire autrui au semblable en le prenant pour son âme. C'est aussi un rapport de « compréhension » dès lors qu’il inclut fondamentalement la vertu en partage et un discours de la maîtrise : l'âme est ici le maître présent en chacun. Or, dans l’âme une de l’amitié, il ne saurait y avoir deux maîtres. Faut-il supposer un tiers, un maître-philosophe qui serait comme le père implicite de cette amitié ? A moins qu'un nouveau rapport, de type inégalitaire, ne soit déjà instauré. Dans la phrase citée en exergue, Montaigne évoque - comme malgré lui, comme dépassé par la fulgurance de sa formule - une sorte de relation qui détruit le mythe d'une symétrie ou d'une égalité parfaite entre les âmes amies (condition supposée de leur identification ou de leur union). On connait les célèbres formules de Montaigne : « je connoissoy la sienne comme la mienne » et « je me fusse plus volontiers fié à luy de moy qu'à moy ». Ainsi est marquée la rupture entre la connaissance, égalitaire par essence, et l'amour foncièrement dissymétrique puisqu'il me conduit à préférer à mon propre jugement celui d’autrui.

Nietzsche misogyne et féministe

 


Quand il s’agit des femmes Nietzsche se veut particulièrement provocateur, voire inamical, puisqu’il va jusqu’à les comparer à des animaux (nommément « chattes », « oiseaux », ou « vaches ») tour à tour séduisants, craintifs ou indolents ! D’après lui la femme veut une amitié toute nue, en quelque sorte avouée, sans mystère et sans polémique, et n’aspire qu’à la facilité. Elle n’est pas capable de mener la guerre à ses amis, et surtout d’honorer ses ennemis, ce qui prouve bien qu’elle confond amour et amitié. Car la suprême amitié consiste à provoquer, à réveiller l’ennemi en son ami, et à aimer l’inimitié de celui-ci pour la liberté que cet acte suppose. En ne pouvant aimer, par nature ou par excès d’humanité, son ennemi, la femme ne peut également accéder au véritable universalisme, celui qui commande d’aimer son ennemi « lointain » (ou l’Etranger) davantage que son ami proche.

Le Nom des amis

 


« Nous nous cherchions avant de nous estres veus, et par des rapports que nous oyïons l’un de l’autre, qui faisoient en nostre affection plus d’effort que ne porte la raison des rapports, je croy par quelque ordonnance du ciel : nous nous embrassions par noz noms » (Montaigne). 

Le nom a ce pouvoir de faire naître l’amitié, en quelque sorte avant l’amitié, comme il la fait perdurer bien après. La renommée de La Boétie est à l’origine du désir de Montaigne de le rencontrer, ce dernier ayant grandement contribué, réciproquement, à la renommée de La Boétie. Mais l’amitié au présent se donne également un nom, ici celui de « frère » : pour nos auteurs c’est le signe d’une reconnaissance, ou mieux, le symbole d’une alliance. D’ailleurs dans le nom de frère, ou le nom du frère, Derrida (Politiques de l’amitié, 1994) voit une médiation entre le Montaigne grec, finitiste, et le Montaigne chrétien, infinitiste. En effet à quoi engage le nom ? Par la nomination j’existe par l’autre, tandis que par l’interpellation j’existe pour l’autre. Si par le nom en général je peux répondre de moi, c’est pour avoir répondu d’abord à celui qui me l’a donné, une première fois unilatéralement, et pour continuer à lui répondre lorsqu’il m’appelle ou m’interpelle. Le premier aspect (nomination) nous renvoie au modèle filial, perpétué par mot "frère", et serait voué à une certaine « spectralité » selon Derrida. Le second (interpellation) dévoile une altérité en même temps qu’une singularité plus grandes, celles de l’ami à qui je parle, et d’abord celui à qui je dois répondre. "Frère" redevient un "nom" comme un autre. Ainsi la question « qui est l’ami ? » (au lieu de « qu’est-ce que l’amitié ? »), épure le concept d’amitié de toute détermination d’essence et de toute relation d’appartenance. Simplement celui qui est appelé ainsi devient comme responsable de l’amitié qu’on lui voue (quel que soit le concept qu’on lui applique) et dont il doit, dès lors, témoigner dans l'échange.

dm


La revanche du semblable. Pour une érotique de l’amitié

 

Jacopo Carucci, dit Pontormo, Double portrait de deux amis (détail), 1523-1524

“Je recule à aimer mon prochain comme moi-même, pour autant qu’à cet horizon il y a quelque chose qui participe de je ne sais quelle intolérable cruauté.” (Lacan)

“L’Autre n’est pas qu’un autre — s’il l’était, il serait aussi bien rien, ou encore indifféremment autre que lui-même, autre manière de dire : rien. L’Autre n’est ni même ni autre. Cela paraît invraisemblable ? Et pourtant oui, cet invraisemblable qu’est l’Autre ne l’est que si potentiellement il est aussi un vrai semblable…” (Patrice Desmons, psychanalyste)

En général l’analogie n’est pas prise au sérieux au regard du réel ; on la cantonne bien souvent à l’imaginaire de la ressemblance, en-deça de la différence essentiellement symbolique du « prochain » qui est le cheval de bataille des éthiques modernes — psychanalyse comprise. Patrice Desmons a raison de souligner que le dénigrement systématique de l’analogie, de la ressemblance, de la sympathie et de l’amour du même, finit par rendre in-vrai-semblable l’éthique actuelle fondée sur l'altérité et la différence radicales, à cause précisément de l’indifférence qu’elle engendre ou qu'elle cautionne implicitement. La ressemblance ne posait guère de problème aux Anciens qui y voyaient le principe même d’une éthique de l’amitié. En effet, celle-ci était censée dériver de l’amour de soi ; le bien voulu à autrui ne pouvait qu’être analogue, et proportionnel, au bien voulu à soi-même. Cependant, pour un philosophe grec, le rapport à soi-même se définit essentiellement comme rapport d’autorité et de maîtrise : s’aimer soi-même, se vouloir du bien, signifie avant tout bien se diriger, se discipliner, serait-ce dans une perspective hédoniste. Aussi peut-on dire : mon ami, mon maître. Le miroir de l’amitié qui se veut formateur, voire correcteur, est donc également déformant. Puisqu’il me représente un au-delà de moi-même, comment la volonté de cet autre ne me serait-elle pas étrangère ? Pourquoi ne serait-elle pas également hostile ? Bref, la réponse éthique traditionnelle est insuffisante parce qu’elle ne voit pas l’au-delà du semblable et du miroir, ou plutôt elle méconnaît le miroir comme étant cet au-delà. Un jour l’image s’effondre parce qu’on se rend compte que le semblable ne me veut pas toujours du bien. Tout semblable qu’il est, il a la liberté de me vouloir du mal, de s’en prendre à mon être par pure méchanceté. La solution — promue par Kant — est de s’en remettre à un grand Autre, c’est-à-dire à la Loi ; non plus au semblable mais au prochain ; ou si l’on veut à l’autre en tant qu’il incarne, non plus ma propre image idéalisée, mais une idée de l’Humanité. Du registre de l’imaginaire, on passe à celui du symbolique ; la ressemblance fait place à l’identification ; le passage s’effectue moins par analogie que par métaphore — choses fort différentes. La première suppose la présence illusoire des deux termes, reliés par un «comme» unificateur. La seconde consiste dans la substitution d’un terme à un autre, par la guise d’une pure différence signifiante. Le respect du prochain, au sens moral, se définit bien avant tout comme respect de l’Autre, voire dans sa formulation contemporaine comme respect de la différence. C’est bien pourquoi l’analogie sous-entendue dans la formule « aimer son prochain comme soi-même » pose problème.

Amitié et inimitié du Logos (sur Heidegger)

 


« Quoi » de philia, l’amitié et non « qu’est-ce que » philia, demande Derrida dans Politiques de l’amitié, tandis qu’il lit Heidegger lui-même lisant Hölderlin (cf. le séminaire de 34-35 sur Le Rhin). Pour répondre, ou plutôt pour entendre cette question, il faut entendre phileîn (l’amour, das lieben, précédant toute distinction entre amour et amitié) avant philia (la définition sociale et philosophique de l’amitié), mais en même temps que le Logos.

Si l’on en croit Heidegger, phileîn (aimer) veut dire à la fois s’accorder et répondre au logos, condition essentielle pour s’accorder avec un ami, mais aussi pour éduquer, etc., et pour aimer plus généralement. Dans la correspondance au Logos, est entendue la voix – comme aussi bien est vu l’éclat – de l’être de l’étant, soit la présence même. Heidegger évoque l’oreille interne, tendue vers le phileîn originaire, qui entend et recueille la parole à nous adressée : l’entente comme ouverture à la présence précède l’ouïe proprement dite. L’expérience originaire (héraclitéenne) du phileîn qui réunit donc einai et legein, précède absolument la protè philia comme la teleia philia philosophiques. Ce retard constitutif du phileîn et du Logos philosophiques, déjà divisés, érotise en quelque sorte le questionnement à propos de l’amitié.

L’amitié, l’écrivain et le mourir

 


« Le seul pleurer m’était doux, seul charme à qui mon âme avait donné la survivance de mon ami » (Saint Augustin, Confessions). De la mort de Patrocle laissant Achille inconsolable à la dédicace des Essais de Montaigne au regretté La Boétie, le deuil de l’Ami apparaît bien souvent comme le nerf et la raison même de cette écriture. Composant ou récitant l’Illiade, Homère consomme la perte définitive de ces héros prodigieux, amis d’un âge définitivement révolu. Montaigne célèbre moins en La Boétie le confident disparu de sa jeunesse que l’initiateur de sa carrière littéraire voire son propre lecteur idéal.

Il y a évidemment une homologie entre pleurer, célébrer, ou encore confesser, et le fait même d’écrire. Dans l’écriture augustinienne, le deuil se manifeste deux fois. Augustin confesse tout d’abord ses égarements passés qui l’ont vu sombrer dans le désespoir après la perte d’un ami cher ; ensuite la tristesse, à laquelle complaisamment il s’abandonne, ne fait que l’éloigner davantage de Dieu, de la vraie vie divine, en se substituant au souvenir de l’ami et jusqu’au désir de le revoir. Et puis, l’amertume, ce deuil égoïste, se convertit en dévotion pour le Seigneur qui est le seul véritable ami, contenant tous les autres, et qu’on ne peut risquer de perdre que si on le quitte. Ce qui pour autant signifie le deuil, le renoncement aux amitiés purement terrestres au profit de l’adoration mystique et, intrinsèquement, de la sublimation écrite. Lorsque Saint Augustin affirme qu’en Dieu, l’amitié ne manque pas, car Dieu ne manque de rien, il ne signifie rien d’autre que la perpétuation de l’amitié dans l’écriture. Défense et illustration : par-delà l’éviction de Philia par Agapè, œuvre de la christianisation, l’écrivain-théologien perpétue ce lien d’amitié à la vérité au moyen du discours philosophique. Le théologien-philosophe, ami de Dieu et de la vérité, endosse cette responsabilité et fait son deuil de l’homme, porte ce deuil.